par angèle casanova

Le dindon de la farce, comédie en 2 actes pour 3 comédiens

mardi 25 septembre 2012

Décor unique. Le marché couvert, un mardi matin à 10h. Automne. Peu de clients. Juste quelques ménagères, les vieux du coin. Les commerçants discutent le bout de gras au coin de leur étal. Notre témoin (de sexe féminin) fait irruption sur la scène par la porte du fond, entre le stand fermé du bouquiniste et les toilettes. Après quelques arrêts de rigueur pour saluer vendeur de patates, volaillère et habitués du café, examiner un lapin à l’air avenant, laisser passer une grand-mère, elle vient se planter devant l’étal du marchand de fruits et légumes. Celui qui jouxte la première entrée latérale, côté boulevard de Strasbourg, face à Ronyprix. On sait jamais. Ce détail pourrait intéresser quelqu’un. Bref. Décor planté.


ACTE I

LE MARCHAND
(Marchand de fruits et légumes, la cinquantaine épanouie, le cheveu gris blanc, lunettes, sympathique. Debout derrière son étal, parle en arabe au téléphone. S’interrompt, et dit au témoin :) : Bonjour madame, le petit va bien ?

LE TEMOIN (tout sourire) : oui, il est à l’école, je vais le chercher après le marché ! (dialogue riche, j’en conviens)

Le témoin palpe les fruits et réfléchit. Prenant un panier, il y dépose délicatement figues, prunes et grappes de raisin.

LA VIEILLE
(petite, menue, tenue démodée, depuis l’autre côté de l’étal) : Ca vient oui ou non, j’attends, j’ai pas que ça à faire ! Je pourrais partir sans payer vous vous en foutez.

LE MARCHAND (toujours au téléphone, lui tourne complaisamment le dos. Absorbé par sa conversation, il sourit dans le vague) : ------

LA VIEILLE
(venant se poster près de notre témoin qui n’en finit pas de choisir ses fruits) : En plus, il parle même pas français. Non mais je vous jure, vous pourriez me répondre quand même ! (ton véhément, cassant, définitivement désagréable)

LE TEMOIN (choqué) : Madame, un peu de retenue, s’il vous plaît ! (ton ferme, poli, mais n’en pense pas moins)

LA VIEILLE (n’a rien entendu) : Non mais franchement, je vais geler sur place, raccrochez, je veux vous payer !

LE MARCHAND (raccroche tranquillement, et se tourne vers notre témoin) : Alors, madame, vous avez choisi ? (grand sourire)

LE TEMOIN : Oui, mais je crois que madame est pressée… (dit-elle en désignant du regard la vieille qui attend, grappe en l’air)




ACTE II

LA VIEILLE (étonnée, regarde le témoin comme s’il tombait d’un wagon de pommes) : Mais non, pas du tout !

LE TEMOIN (ahuri) : Mais je vous ai entendue…

LE MARCHAND (éclate de rire, lève les bras au ciel) : C’est un petit jeu entre nous, on le fait à chaque fois.

LA VIEILLE (souriante que ç’en est étonnant) : On aime bien se faire des blagues. C’était pas sérieux, jeune fille.

LE TEMOIN (sur le cul) : Et bien ça alors, c’est la meilleure !




MORALITE DE L’HISTOIRE

Comment, croyant défendre la veuve et l’orphelin, si l’on n’y prend garde, il est fort possible que l’on se retrouve bien malgré soi dans le rôle du dindon de la farce.

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