par angèle casanova

Ils sont vivants

mardi 5 juillet 2016

La boîte accueille les livres dont on ne veut plus, ou ceux qu’on aime trop pour ne pas les partager. On ouvre sa porte vitrée, une odeur de bois s’en échappe, on y dépose un livre, on regarde ceux qui s’y trouvent déjà, on en choisit un, et on s’en va.
Le livre reste là, à attendre.
Peut-être que ces livres se tiennent compagnie. Dès qu’on a le dos tourné, ils expulsent bras et jambes de derrière les pages. Ils s’étirent, comme après une longue sieste, et puis chacun y va de son commentaire sur la vie du quartier. Et toi, ton dernier proprio, il était comment ? Sympa, mais il aime corner les pages. Mon pauvre, t’as bien dû morfler. Mais tu en as vu le bout, maintenant. Fais-toi beau, t’as de sérieux atouts, personne ne regardera tes pages cornées, ta couverture est encore belle et ton auteur est aux petits oignons.
Et les discussions se poursuivent, ainsi, jusqu’au bout de la nuit. L’obscurité ne les dérange guère, ils se serrent les coudes, se racontent leur vie, se font la lecture en rougissant de montrer leurs dessous et puis, au premier bus qui passe, se referment d’un coup sec et s’alignent au garde à vous, on ne sait jamais, un passant matinal pourrait les démasquer.

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