par angèle casanova

le soutien-gorge (quelques notes)

jeudi 17 décembre 2015

la lumière joue sur le plafond voûté
les statues émergent de l’ombre
fantômes voluptueux
l’eau rasante file droit au milieu

verte plane silencieuse
elle s’étend sur toute la longueur du bâtiment

***

la piscine
un peu moins de cinquante mètres
qui ne furent jamais olympiques
a été inaugurée en mille neuf cent trente deux
elle couvrait toute la surface de la fosse
là où sont les statues
le portique n’était pas là
au grand bain
elle était profonde de plus de trois mètres

***

ils avaient coutume de jouer sous ce lion qui n’en est pas un
de s’asperger avec l’eau de sa bouche
de s’y donner rendez-vous
en contrebas de la rosace qui rayonne toujours
en triangle maçonnique

***

elle se souvient
elle y venait souvent
son frère aussi
jamais en même temps
la piscine n’était pas mixte

elle le fut pourtant le jour où
elle passa son brevet de surveillante de baignade

ce jour-là
elle perdit son soutien-gorge
au début de l’épreuve
il ne lui manqua pas
après un instant d’hésitation
elle décida de finir la course
et sortit de l’eau
les mains en coupe sur ses jeunes seins

***

elle me raconte cette histoire
ses yeux pétillent
elle a presque quatre-vingts ans


Ce poème résulte d’une coincidence triple.
Ma visite au musée de la Piscine de Roubaix début octobre.
Ma rencontre avec la famille de mon amoureux, qui m’a parlé de cette piscine à l’époque où, précisément, elle était une piscine.
Et puis l’appel à contribution pour le numéro 0 de la revue La Piscine, qui n’a malheureusement pas retenu mon texte.

Ce poème est dédié à Marie-Claude et Xavier. Marie-Claude m’a confié ses souvenirs, et Xavier m’a envoyé de la documentation sur le musée. Qu’ils soient remerciés pour leur aide précieuse.

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