par angèle casanova

géométrie variable

dimanche 3 août 2014

Ce qu’elle a ce qu’elle est. Comment départager. C’est compliqué. Avoir un corps. L’incarner. Être ce corps. Le dépasser de l’intérieur. Être autre à l’intérieur. S’en sentir écartée. Mise à la marge. Être chair et puis quoi. Alors traîner ses guêtres. Se heurter à tous les coins de bureau qui passent.

Elle vit sa vie avec ce corps. Lorsqu’il mourra, elle disparaîtra. Tout simplement. Comme un mirage. C’est étrange. D’être. Une. Vision. Du monde. De le dominer de son regard. De l’ordonnancer à sa façon. Et de le faire à partir de ce corps. Ancrage si mince. Elle serait un cerf-volant retenu par un filin en plastique. Au moindre coup de vent, il claque. Il se cabre. Et puis, sans crier gare, le filin cède, ou le nœud qui le retient à quelque bout de branche se défait. Et il s’envole. Et elle disparaît.

Ce qu’elle a ce qu’elle est. Rien. Un rêve peut-être. Elle traîne ses guêtres. D’homme en homme. De corps en corps. Elle s’ennuie. Son corps bouge, ressent du plaisir mais pourquoi. Elle s’use la cervelle à trouver un sens à tout ça. Alors elle pense en termes géométriques. Cercles. Triangles. Carrés. Losanges. Elle articule en son for intérieur, gourmande, son préféré. Parallélépipède. Elle plisse les yeux. Elle géométrise sa vue. Tout se résume à cela. Mouvements. Trajectoires. Poussées. Des corps s’imbriquent. Se séparent. Forment des figures. De style. Peut-être. Des amorces. Des images. Des tentatives de quelque chose. Fugace. Sans consistance. Qui s’échappe dès qu’elle tend la main pour le saisir. Alors. Elle bouge. Elle aime. Elle vit. En tendant les mains. En doublant les figures formées par son corps et les leurs. Avec ses doigts. Elle trace dans l’air des incantations géométriques. Qui prennent la forme. D’une réflexion. Sur sa vie. Sa sexualité. Le monde. Et tentent. Pourquoi pas. De le figer. De le rendre compréhensible. D’un seul geste. Englobant. De la main.

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